C'est comme une photo polaroîd tout juste sortie de l'appareil: au début, on ne distingue rien, tout est flou, et puis graduellement les contours se dessinent, les couleurs apparaissent, les détails deviennent visibles. Et soudain l'image prend tout son sens.
Le nouvel album de Minor Majority est ainsi. Il ne se satisfait pas d'une seule audition. Ce n'est qu'après l'avoir écouté plusieurs fois qu'on commence à en mémoriser les subtiles mélodies, à différencier les climats, à remarquer la parfaite harmonie des arrangements: l'arrivée impromptue d'un banjo ici, quelques notes parfaites d'harmonica là, plus loin un solo de guitare tout en retenue et en élégance, ou bien une voix féminine épousant à la perfection celle incomparable de Pål Angelskår.
Les disques de Minor Majority étaient trop court ? Celui-ci fait près de 50 minutes. On s'agaçait parfois des points de croix façon Knopfler de la guitare ? Ils ont ici complêtement disparu. Ne reste que la tranquille assurance d'un groupe parvenu en quelques années au sommet de son art.
En Norvège, où l'album est sorti depuis le 23 janvier et où - pour une raison mystérieuse - la presse musicale note les disques sur 6, la majorité des critiques lui ont attribué un 5 et plusieurs d'entre eux la note maximale, ce qui n'arrive pratiquement jamais. Il faut dire que "Reasons to hang around" fait partie de ces disques d'exception qui deviennent les compagnons d'une vie. Les modes pourront passer, les gloires éphémères se faire et se défaire, lorsqu'il faudra revenir à quelque chose d'authentique, de chaleureux, de simplement beau, la musique de Minor Majority sera toujours là. (6/6)